(Lire le début du compte rendu du triangle BS-SP-PB)
Compte rendu de la diagonale Brest-Strasbourg
Diagonale Strasbourg-Perpignan
du 1 au 4 octobre 2010.
Même si j’ai très bien dormi j’ai tout de même entendu le déluge qui c’est abattu toute la nuit sur la ville…
Le petit déjeuner chez Jocelyne est, comme celui de la veille, bien copieux avec en plus un beau kouglof ! Jocelyne m’en donnera deux belles parts à emporter (je n’ai pas voulu tout prendre !).
Lorsque nous nous mettons en route la pluie a finalement cessée !
Cette Diagonale est la plus courte du triangle. Elles fait d’ailleurs partie des deux Diagonales les plus courtes avec Hendaye-Menton : 940 Km officiellement.
Mon parcours est prévu pour 974 Km, ce qui ne change rien au délai de 78 heures soit 3 jours et 6 heures.
Cette fois je n’ai pas calculé mon heure de départ pour une arrivée avant minuit (cela m’aurait fait partir à 18 heures…) mais en trouvant un compromis m’accordant une deuxième nuit à Strasbourg suffisamment longue pour repartir bien reposé et me ménager un repos un peu plus long à Perpignan avant d’attaquer la troisième diagonale.
Ainsi en quittant Strasbourg à 8 heures il me faut atteindre Perpignan avant 14 heures (trois jours plus tard !).
Le temps de valider au commissariat et Jocelyne me guide pour sortir de la ville et me mettre dans la bonne direction.
Deux milles feux rouges plus tard (environ) c’est chose faite, il n’y plus qu’à remercier Jocelyne pour son hospitalité, la qualité de son accueil et du guidage tant à l’arrivée qu’au départ de Strasbourg et… à descendre à Perpignan !
Vendredi 1er octobre : cette première étape doit me mener à Dole via Belfort et Besançon.
À Marckolsheim (Km 53), alors que le soleil commence à percer, une opportunité sympathique se présente : un banc bien exposé et une boîte aux lettres juste à côté. Le banc me permet de tenir le vélo le temps de poster ma carte « départ » et de grignoter un peu. Il est 10h25, il y a trois heures que j’ai petit-déjeuné et il faut tout à la fois s’alimenter régulièrement et minimiser le nombre d’arrêts.
Durant cette pause que je souhaitais courte, un quidam s’intéresse à mon vélo et à ses trois plaques de cadre. Il veut tout savoir sur les diagonales. Ce monsieur est très sympathique mais j’ai beau lui redire que les diagonales se font en temps limité et que le chronomètre tourne, j’ai du mal à m’en défaire…
La première centaine de kilomètres est vraiment facile, pas de relief, pas de vent, un soleil de plus en plus présent : que du bonheur comme on dit de nos jours !
Premier contrôle à Belfort, le relief c’est un peu accentué mais il fait vraiment très beau et, pour la première fois depuis Brest, je prends ma consommation attablé sur une terrasse au soleil !
Pour rejoindre Besançon, j’ai choisi de quitter la départementale principale et de suivre la vallée du Doubs. Ce choix s’avère excellent pour ce qui est d’éviter une circulation vraiment infernale.
Me voilà sur des petites routes tranquilles, pas une voiture. En revanche la moyenne en prend un coup : la chaussée est souvent en mauvais état et donc fort peu roulante. Cela dit le parcours est vraiment très agréable : sous les arbres, au bord de l’eau… mais une fois le soleil couché il fait vraiment froid et humide !
La ligne de chemin de fer qui longe elle aussi la vallée mais à flanc de coteau ajoute régulièrement une petite touche sympathique et hors du temps à cette partie de l’étape.
En chemin, passant devant une boulangerie assez importante peu de temps avant la fermeture, je décide de m’arrêter pour faire le plein de provisions pour la soirée. Je consomme sur place un pain au chocolat et réussi à caser dans mes sacoches une pizza, une flammenküche, et une tarte saucisse sèche/fromage…
Mon arrivée à Besançon est un retour dans la réalité de la ville, de la foule et de la circulation. Après tous ces kilomètres un peu hors du temps et très bucoliques me voilà plongé dans l’enfer du bruit, des gaz d’échappement et de la fureur automobile… Je préfère ne pas m’attarder, de juste valider mon contrôle et de poursuivre ma route jusqu’à mon hôtel de Dole.
Malgré tout la pizzeria où je fais tamponner mon carnet est bien sympathique. Il y règne une bonne ambiance visiblement faite d’habitués déjà bien… guillerets ! Un convive tient absolument à me payer un coup à boire (« ben oui, je peux bien payer à boire à un gars qui fait 300 bornes à vélo tous les jours ! »). Une me demande si je n’ai pas besoin de compagnie. Je lui dis qu’elle a cinq minutes pour aller chercher son vélo..
Je repars sans attendre et parcours sans soucis particulier les 55 Km restant jusqu’à mon hôtel de Dole.
Je ne sais pas encore que je viens de manger tout mon pain blanc de cette diagonale…
Samedi 2 octobre : de Dole à Valence via Louhans et Lyon.
Je quitte Dole à 05h30, il fait nuit bien sûr. La navigation retient toute mon attention car pour mes trois diagonales j’ai choisi majoritairement de toutes petites routes, certaines même sans numéro…
Il me semble que maintenir la vitesse prévue me demande un certain effort, mais n’arrivant pas à faire la part des choses entre le mauvais revêtement de la chaussée, la difficulté de juger du relief et du vent dans le noir , je me contente de pédaler !
Le jour se levant, il m’apparait de plus en plus clairement que le vent vient du Sud et donc qu’il m’est défavorable !
À Louhans, mon troisième contrôle, je perds un peu de temps car le premier café dans lequel je pensais petit-déjeuner n’a pas de tampon. Heureusement que j’ai pris l’habitude de poser la question sitôt entré, avant même de consommer. Pas de tampon, pas de consommation ! Telle est ma règle !
Le café où je m’installe finalement connait le principe, il me dit avoir vu un diagonaliste en juillet !
J’accompagne mes grands cafés des parts de kouglof données par Jocelyne à mon départ de Strasbourg.
Je reprends la route. Arrivé à un carrefour un panneau m’indique « route barrée à 4 Km » et veut me faire prendre une déviation, laquelle bien sûr rallongerait mon parcours. Que faire ? Continuer comme si de rien n’était (normalement à vélo on arrive toujours à passer d’une façon ou d’une autre) ou ne pas prendre de risque et suivre la déviation même si cela doit me coûter de façon certaine des kilomètres supplémentaires ?
Je décide de tenter le coup et continue comme si de rien n’était…
Les kilomètres défilent et pas la moindre trace de travaux. Suspense. Soit les panneaux « déviation » sont inutilement restés en place pour le weekend, soit… je risque de devoir faire un demi-tour vraiment bien long…
Soudain j’aperçois les raisons de la déviation : à la place de la route, une plaie béante. Plus de pont pour franchir une petite rivière… plusieurs mètres en contre-bas…
La chaussée est barrée de deux rangées de gros « lego » rouges et blancs à 30 mètres l’une de l’autre.
Je ne peux me résoudre à l’idée de faire demi-tour pour rejoindre la déviation et décide de m’approcher pour voir s’il n’y a pas moyen de franchir le… Rubicon.
Je porte le vélo, franchis le premier barrage puis le second. Au fond de la tranchée apparaissent au milieu de l’eau et de la boue les fondations du futur pont…
Mais, en regardant à droite et à gauche s’il n’y a vraiment pas moyen de passer je vois qu’un peu plus loin, dans un champ, un passage a été aménagé dans la terre pour les engins de chantier. Ouf ! Un peu de gymkhana dans la boue et me voilà bon pour porter à nouveau mon vélo pour franchir les deux barrages… de l’autre côté. Beaucoup moins de temps perdu que si j’avais dû faire demi-tour… et sûrement moins que si j’avais pris la déviation. Le pari est gagné !
Une fois le calme revenu il s’avère que plus j’avance, plus le vent de Sud se renforce ! La progression devient de plus en plus difficile.
Mon trajet passant par Lyon j’ai choisi de rejoindre la Saône un peu au nord de cette grande ville, plus précisément à Rochetaillée-sur-Saône où je dois voir des amis.
Du fait du vent j’arrive avec du retard sur mon horaire. Normalement je comptais seulement saluer mes amis au passage car il me semblait qu’aller chez eux exigeait un détour. Pierre ayant insisté au téléphone comme quoi mon parcours ne passait qu’à 150 mètres de leur maison j’ai fini par décider de m’y rendre…
Mais j’ai du mal à trouver précisément leur maison (je n’étais encore jamais venu, nous nous sommes rencontrés au ski puis en Bretagne). J’appelle Véronique au téléphone qui vient me guider avec sa voiture. De chez eux on a une vue magnifique sur la Saône, mais quelle côte pour y arriver !
Seulement voilà, entre le vent qui me scotche sur place depuis le matin, le temps perdu à essayer de trouver leur maison et les 2 x 3 Km de détour (!) j’ai consommé la marge prévue et du coup ne fais que passer… en coup de vent !
Le temps de manger (une partie de) ce que Véronique m’a préparé, d’emporter du ravitaillement pour plus tard (que je serai bien content d’avoir à l’hôtel le soir à Valence) et me voilà reparti car j’ai rendez-vous de l’autre côté de la Saône avec François Gerfaud, sariste, qui doit me guider pour traverser Lyon (mon quatrième contrôle) en ce jour de manifestations !
François m’avait contacté par téléphone pour me proposer de m’aider à traverser Lyon. C’est bien volontiers que j’ai accepté son aide. Et bien m’en a pris !
En effet, ce samedi 2 octobre est jour de manifestations contre la réforme des retraites. Certaines des rues que j’avais prévu d’emprunter sont interdites à la circulation…
Le guidage de François m’a évité bien du tracas. Traverser une ville inconnue n’est jamais simple à vélo (sens uniques, circulation..) dans le cas d’une métropole comme Lyon, un jour de manifs qui plus est, cela aurait pu tourner à la galère. Une fois de plus vive les saristes !!!
Juste un arrêt pour valider mon contrôle et boire un coup et François me guide jusqu’au Sud de Lyon, en restant rive droite de la Saône.
Il ne me reste plus qu’à continuer cap au Sud jusqu’à Valence, terme de cette deuxième étape. Je reste rive droite du Rhône. Contrairement à ce que j’espérais le vent n’a pas faibli avec la fin du jour… Je suis juste un peu moins exposé ce soir que je ne l’étais jusqu’à Lyon.
La dernière partie de l’étape, Andance–Valence (D86), m’est connue puisque je l’avais déjà empruntée l’an dernier lors de Brest-Menton.
Dimanche 3 octobre : de Valence à Narbonne via Uzès et Sète.
En quittant Valence peu après 6 heures, il est tout de suite évident que le vent n’a pas cessé et je commence à me fait à l’idée que Strasbourg-Perpignan aura lieu avec vent de face jusqu’au bout…
En revanche, il fait bien chaud. En repartant de Bagnols-sur-Cèze où je me suis arrêté déjeuner, le thermomètre affiche même 32° ! Rien à voir avec les températures de Brest-Strasbourg.
À partir d’Uzès (contrôle 6), le vent ne fait que se renforcer et ma progression demande une énergie de plus en plus importante. Le ciel, si bleu jusque là, commence même à se couvrir en arrivant sur Nîmes.
Je décide de mettre le turbo et déployant une énergie dingue j’arrive enfin à Sète, mon septième contrôle.
Le patron de la pizzeria où je m’arrête pour valider mon carnet est très sympa. Il m’offre mon grand crème. D’après lui le vent est encore pire du côté de Narbonne. La région est en alerte orange avec des vents à plus de 90 Km/h…
Je repars sans trop tarder. J’ai tellement forcé pour arriver là que je sens mes genoux qui commencent à brûler… mieux vaut reprendre la route avant que les douleurs n’apparaissent.
La dernière partie de cette étape sera épique : les routes sont couvertes de branches d’arbre, de détritus divers qui volent en tous sens.
Plusieurs fois des diagonalistes se sont étonnés de mon chargement « tout à l’arrière ». Je me félicite de ce choix. Dans les moments avec vent latéral il m’arrive déjà avec le peu que j’ai sur le guidon de faire de belles embardées sous les bourrasques… (j’ai déjà eu l’occasion de voir ce que donnait chez moi le pont Albert Louppe par jour de tempête avec une sacoche de guidon…).
Initialement j’avais prévu aller jusqu’à Béziers mais je compte en fait atteindre Narbonne dès ce soir afin de ne laisser qu’une toute petite étape pour le dernier jour.
C’est avec une grande fatigue mais une satisfaction non moins grande que j’arrive enfin à mon hôtel de Narbonne. Il ne me reste plus que 73 Km pour atteindre Perpignan avant demain 14h00…
Lundi 4 octobre : de Narbonne à Perpignan.
Je quitte l’hôtel à 07h00 ce dernier matin. Je décide de rouler non-stop jusqu’à Perpignan afin de ne pas relâcher la pression car le vent est toujours très violent et parfaitement de face.
Je poste ma carte postale « Arrivée » quelques kilomètres avant Perpignan que j’atteins avec seulement trente minutes de retard sur mon planning, après 700 kilomètres de vent contraire !
Là aussi j’ai prévu un jour de repos avant de repartir pour la diagonale suivante.
Je suis hébergé à Saint-Estève, à six kilomètres du commissariat de Perpignan, chez des cousins.
J’avais dis que je serais là pour midi, le temps de faire une petite pause à Perpignan et je suis chez eux à midi quinze !
Une bonne douche, un bon repas sur la terrasse à l’abri du vent et cela va déjà mieux. Une bonne sieste là-dessus et la magie opère, la fatigue disparaît au profit de l’euphorie de cette deuxième réussite malgré des conditions difficiles.
En émergeant de ma sieste mon linge est déjà propre et sec !
Le mardi 5 octobre sera consacré à la préparation du vélo pour la troisième diagonale, au repos et à une copieuse alimentation !
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